Népal : la misère des jeunes Népalais

IMG_7344« Hindouisme, Bouddhisme, Tourisme. » Cette trinité un peu farfelue résonne souvent dans la bouche des guides de treks népalais de Katmandou. Elle résume la réalite sociale du pays. Les Népalais se reposent en effet beaucoup sur la religion pour accepter leur sort et le tourisme y est associé tant il est synonyme de salvation pour beaucoup de travailleurs. Entre religion et tourisme il n’y a pas grand chose. L’Etat est absent en raison d’une grande instabilité politique depuis la fin de la guerre civile qui a frappé le pays de 1996 a 2006 faisant près de 14 000 morts.

Résultat, le chômage touche quasiment un travailleur sur deux et il est très dur de sortir de la pauvreté. Beaucoup de jeunes Népalais tentent donc de quitter le pays pour aller travailler en Australie, Corée du Sud, Japon ou Royaume-Uni. Problème, le visa coûte une fortune : environ 15 millions de roupies népalaises, soit 150 000 euros. En résumé, à moins d’être « fils de… » ou de pouvoir justifier d’une mini fortune personnelle, il est quasiment impossible de quitter le pays pour aller tenter sa chance à l’étranger. Les jeunes étudiants de Katmandou ou de Pokhara sombrent donc vite dans le désespoir et beaucoup de témoignages rapportent une forte consommation de drogues dans le milieu étudiant. Ce qui n’est pas étonnant tant il est facile de s’en procurer dans les rues des villes ou dans les montagnes, véritable sanctuaire où la « marijuana », comme on dit ici,  pousse partout.

Difficulté supplémentaire pours les jeunes népalais, ils doivent prendre en charge leurs parents jusqu’à leur mort. Rares sont donc ceux qui quittent le domicile parental avant le mariage et pour beaucoup de ceux qui veulent étudier ils doivent se trouver un petit boulot car leurs parents ne peuvent pas les aider. Et pour ceux qui arrivent a obtenir un diplôme il est ensuite très difficile de trouver du travail. Pour incarner cette situation, nous avons rencontré un jeune étudiant népalais en fac de commerce, Tuk, 22 ans, qui finance ses études grâce à son travail de porteur lors de treks dans les Annapurna.

Tuk, 22 ans, etudiant en fac de commerce a Pokhara er porteur. Avril, 2013

Tuk, 22 ans, etudiant en fac de commerce a Pokhara et porteur. Avril, 2013

 » Un salaire ici permet juste de survivre »

Quelles sont les principales difficultés pour les jeunes népalais aujourd’hui?
Tuk : « Le manque d’opportunités, spécialement pour les castes inférieures. Pour cent offres d’emplois il peut y avoir jusqu’à 50 000 candidatures. Et pour y arriver, il faut faire des études ou connaître quelqu’un, le népotisme est présent a tous les niveaux ici. Mais la génération de nos parents n’a pas fait d’études, beaucoup sont fermiers ou agriculteurs comme mes parents. Dans mon village, personne ne fait d’études car personne ne croit en eux. Et ceux qui n’ont pas d’études vivent en grande difficulté. Un salaire ici permet juste de survivre. C’est pour cela que 90% des jeunes essayent de quitter le pays avec des visas étudiant mais en réalité ils partent pour travailler et très peu y arrivent. »

Quelles solutions ont les jeunes pour s’en sortir?
« Moi j’ai choisi de rester et d’étudier plus par plaisir d’apprendre que pour trouver un job. J’ai bien évidemment aussi besoin de travailler mais c’est pour survivre pas pour économiser. J’ai donc choisi le trekking car c’est ma passion. J’aime voyager, rencontrer des gens et découvrir de nouvelles choses. Mais c’est un secteur très difficile. Les places sont rares car la concurrence est inégale. On trouve des porteurs qui acceptent d’être payés 800-900 roupies par jour (8-9 euros), c’est impossible pour moi d’accepter. Autre difficulté, la saison des treks ne dure que 4 mois. Je n’ai donc pas de travail 8 mois par an. Pour pallier cela j’envisage d’ouvrir un petit café avec mon petit frère. »

Quels sont tes rêves pour le futur?
« Etre guide de trek. Rencontrer des gens du monde entier et leur raconter mon pays. Quand j’aurais terminé mon Bachelor je suivrai une formation pour obtenir ma licence de guide. C’est vraiment ma passion, je ne veux pas rester derrière un bureau toute ma vie. Après ça, je réessaierai de partir a l’étranger pour gagner de l’argent et le réinvestir ici. J’aimerais participer à des projets de développement pour aider les gens. Ca m’inspire et me motive beaucoup. »

A propos Angel Herrero Lucas

Journaliste / Content curator sur l'actualité du XXIe siècle
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Un commentaire pour Népal : la misère des jeunes Népalais

  1. raphaelleanchorage dit :

    Article très intéressant!

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